Stéphanie Vignes, agente de parfumeurs

Par Lionel Paillès

Stéphanie Vignes

Elle irradie quelque chose de cool et de chaleureux. Avec le franc-parler de celles qui savent emporter l’auditoire en quelques formules bien choisies, et cet accent du sud qui caresse l’oreille (elle est née à Tarbes), Stéphanie Vignes raconte son parcours.

On l’a connue à Biarritz, directrice de l’agence d’événementiel Scommunication spécialisée dans le sport, la musique et la gastronomie. Le parfum ne fait pas partie alors du périmètre de son activité. Jusqu’au jour où elle est chargée, il y a douze ans, d’une mission d’accompagnement des parfumeurs par Alexandrine Demachy, qui dirige alors la société de création Fragrance Ressources. « J’ai passé six mois à travailler avec les parfumeurs, à les accompagner, les nourrir d’inspirations ». Une expérience passionnante au goût d’inachevé qu’elle gardera en mémoire. C’est en 2020 qu’elle lance l’agence Grace, dédiée aux parfumeurs indépendants. Stéphanie est agent de parfumeurs comme il existe des agents littéraires, un nouveau métier qu’elle invente au fil de l’activité. « Non seulement j’accompagne les parfumeurs, je négocie leurs contrats, mais je leur cherche des clients en explorant de nouveaux secteurs comme le sport, la musique, la décoration, un univers du lifestyle où le parfum n’est pas encore présent », explique-t-elle. Elle collabore ainsi avec la société de mobilier danoise & Tradition ou la marque de maillots de bain Albertine.

A chaque fois, les choses se déroulent de la même manière. Stéphanie commence par suggérer à la marque le nom d’une ou d’un parfumeur susceptible de répondre à la demande spécifique. « Une fois que mon client a validé ma proposition et que le contact est établi, je m’efface et ils continuent en dialogue court », s’amuse-t-elle. Afin de protégrer le créateur, Stéphanie a rédigé un contrat-type avec l’avocat Marc-Olivier Deblanc, spécialiste de la propriété intellectuelle. Elle y a inclus notamment le règlement par la marque d’un “forfait de création”, chose inhabituelle dans l’industrie où la maison de composition se rémunère plutôt au kilo de concentré vendu. Elle a même fait en sorte que le nez perçoive un pourcentage sur la deuxième commande de concentré. Le document stipule enfin que le parfumeur refuse d’effectuer la copie d’un parfum existant sur le marché. De son côté, l’agente touche 20% des émoluements perçus par le parfumeur. Stéphanie Vignes ne dispose d’aucun bagage technique et n’entend pas se former aux matières premières chez Cinquième Sens ou ailleurs : « J’apporte une vision neuve, humaine, fraîche, naïve parfois, c’est-à-dire un regard différent d’une évaluatrice au parfumeur. Je peux travailler avec des mood boards pour lui offrir d’autres pistes de travail ». Si elle ne parvient pas toujours à faire comprendre aux marques la plus-value qu’elle apporte, Stéphanie Vignes est convaincue de l’originalité et de l’intérêt de sa démarche dans une industrie où les parfumeurs indépendants sont de plus en plus nombreux et peinent à trouver leur place.

« Je milite avant tout pour le respect du travail artistique du parfumeur et j’ai la volonté de le mettre au centre du processus de création ». Sa petite écurie compte déjà quelques parfumeurs de renoms : Karine Chevallier, Antoine Lie, Luca Maffei, Michael Nordstrand, Aglaé Nicolas et Marissa Zappas. Son dernier projet : un parfum développé par Antoine Lie pour la photographe Sonia Sieff à l’occasion de la publication de son ouvrage “Rendez-vous !” consacré au nu masculin. Elle est fière d’avoir également accompagné ce parfumeur de talent dans la création d’un deuxième parfum pour la maison Trudon, une fleur d’oranger revisitée, dont elle ne peut pas révéler le nom, qui sortira en septembre.

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