J’Adore de Dior, Cuir de Lancôme, Lola de Marc Jacobs, c’est elle. Beyond Paradise d’Estée Lauder, Vent Vert de Balmain, c’est aussi elle. Tommy Girl de Tommy Hilfiger, Rock Princess de Vera Wang, L’Air du Temps Collection Lumière c’est encore elle. Et bien sûr L’Air du Paradis de Nina Ricci et Dylan Blue de Versace. Et bien d’autres. Rencontre avec cette créatrice franco-russe inspirée et inspirante.
Que signifie pour vous « créer » un parfum ?
Créer, c’est ouvrir son cœur à ses émotions et savoir les recevoir. C’est l’art d’assembler l’inattendu. D’origine russe par ma mère, j’ai cette sensibilité naturelle liée aux émotions et à la beauté. C’est elle qui, artiste, est d’ailleurs la première à déceler mon aptitude olfactive et à m’encourager à « devenir nez »… Je ne savais pas ce que cela voulait dire !
Quelle voie souhaitiez-vous suivre?
Je voulais devenir médecin. Mais mon odorat en a décidé autrement. Il semble me guider depuis mon enfance. C’est mon premier contact avec le monde, ma manière d’appréhender mon environnement. Mon nez me guide : je regarde autour de moi… comme un animal ! Depuis toujours…
Comment avez-vous choisi la parfumerie ?
C’est ma tante qui m’a poussée dans cette voie parfumée et surtout Françoise Caron, mon mentor, qui m’a encouragée.
Vous avez une affection particulière pour les odeurs …
Oui, au fil des années, je réalise à quel point les odeurs procurent du bien-être. Elles font du bien à ceux qui les sentent, y compris dans le monde médical… Le parfum peut rendre heureux ceux qui le portent.
Quelle est la vocation du parfum selon vous ?
Pour moi, le parfum est un langage qui nous relie à la mémoire olfactive, un trait d’union avec elle.
Par exemple ?
Parmi les plus marquants, l’odeur du jaboticaba, un petit fruit brésilien qui pousse sur un tronc, découvert à 8 ans quand nous vivions au Brésil. Il est pour moi l’odeur du bonheur.
Comme le sont aussi des saveurs en cuisine ?
Oui ! Comme celles des ingrédients dont je me sers pour imaginer des ateliers gustatifs, autour du litchi et de son goût rosé par exemple.
Quelles sont vos matières préférées en parfumerie ?
J’aime tout ce que peut produire le bigaradier, de la bergamote au citron vert, de la fleur d’oranger au néroli ou au petit grain !
Je suis cavalière et l’air de la campagne, l’odeur du foin, des chevaux, du cuir des selles, peuvent aussi me donner des idées…
Etre parfumeur, c’est aussi être artiste, comme un musicien ou un peintre ?
Je m’intéresse aux autres formes de création. Je suis très sensible à la musique. Vivaldi, Purcell, Lully, sont des génies qui ont su mettre en musique la froidure par l’effet qu’ils produisaient sur les humains leur rendant la voix chevrotante !
Comme le musicien, le parfumeur est un créateur qui interprète. En assemblant des ingrédients, il peut ainsi réveiller des émotions, au même titre que les notes avec la musique…
Isabelle Sadoux