Pendant 10 ans, Lawrence Taylor a accompagné la transformation digitale de grandes marques telles Hermès, AXA, Evian, KLM, Louis Vuitton… Puis, il a dirigé et développé l’offre digitale globale du groupe Havas : Programmatique, Social, Mobile, Performance et Affichage en France et en Angleterre. Il a fondé Retail4Brands, une agence spécialisée dans le développement du e-retail et du retail marketing, notamment sur Amazon.
En partenariat avec The Fragrance Foundation France, Lawrence Talyor animera une masterclass le jeudi 16 janvier 2020 (8h30 – 10h30). Nous avons posé 5 questions à cet expert, pour mieux saisir les enjeux d’Amazon pour le Parfum.
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FFF – À quel moment les marques de parfum ont-elles investi Amazon ? Pouvez-vous donner quelques chiffres illustrant cette tendance ?
Lawrence Taylor : Il faut garder en tête que, sur Amazon, c’est la demande client qui drive l’offre produits. C’est une logique différente de celle des sites des distributeurs qui effectuent au préalable une curation des produits. En fait, les marques de parfum ont toujours été présentes sur Amazon mais plutôt par le biais des distributeurs qui profitent de l’aubaine. Or, aujourd’hui, les Maisons de parfum doivent saisir l’opportunité de reprendre la main…
Amazon est une plate-forme ouverte où l’on dénombre plus de 300 millions de références. En 2019, Amazon se situe en 3ème ou 4ème position des sites de Beauté en France et en 1ère ou 2ème position en Europe (en terme de chiffre d’affaire – selon les estimations de ecommercedb.com). De fait, pour les consommateurs, Amazon est devenu le moteur de recherche orienté produit. Aux US, 900 000 requêtes parfum/mois passent par Amazon (vs 300 000 via Google). Globalement en Europe, les requêtes parfum sur Amazon sont 2 fois supérieures à celles sur Google.
La France fait pour le moment figure d’exception culturelle car elle est assujettie aux règles de la distribution sélective. On peut d’ailleurs observer que des parfums–clones en ont profité pour s’infiltrer sur Amazon, générant jusqu’à 100 000 euros de CA par mois. Certains groupes tel Coty ou L’Oréal commencent à importer des best practices des US et à tirer profit de l’aubaine Amazon.
FFF – En tant que market place, quel rôle joue Amazon dans la conversion en acte d’achat (vs le site de e-commerce propre à la marque) ?
Lawrence Taylor : Le consommateur donne sa préférence à la simplicité et à la facilité. Amazon lui est utile pour 2 raisons. D’une part, C’est un outil d’achat qui garantit une livraison en 24 heures, le meilleur prix et l’absence de mauvaises surprises. Le consommateur qui a déjà créé son compte Amazon va donc privilégier cette plate-forme plutôt que la boutique en ligne d’une marque. D’autre part, Amazon est utilisé pour la recherche d’informations. La cible des marques du Parfum est présente sur cette plate-forme. Il faut profiter de cette visibilité potentielle.
FFF – Pouvez-vous décrire l’écosystème que les marques doivent mettre en place autour d’Amazone ?
Lawrence Taylor : La commercialisation sur Amazon s’effectue de 2 manières : Via le retail : les marques ou distributeurs vendent leurs produits à Amazon, qui se rétribue par une marge. Dans ce cadre, la plate-forme propose son accompagnement dans la mise en ligne. Via la market place : les marques vendent leur produits directement au consommateur en reversant une commission à Amazon. Elles ont alors davantage la main sur le processus de vente.
Il faut que les marques considèrent qu’Amazon n’est pas un partenaire mais un algorithme. Amazon fonctionne selon des règles très structurées qu’il faut comprendre. Amazon est totalement centré sur le client. Le système est construit autour de cette obsession : délivrer le meilleur produit, au meilleur prix et avec la livraison la plus fluide possible.
FFF – Comment les marques peuvent-elles améliorer leurs performances sur Amazon ?
Lawrence Taylor : Voici 5 règles à retenir. En premier lieu, il faut faire appel à des talents digitaux orientés ROI, capables de proposer la meilleure organisation possible. Les data scientists savent mesurer l’efficacité de l’expérience client, de la publicité afin d’optimiser les taux de conversion finaux. D’autre part, il est nécessaire de maîtriser tous les canaux de distribution si vous souhaitez proposer les prix les plus compétitifs du marché. En effet, Amazon s’aligne sur les prix les moins chers du marché. Amazon pousse à changer le paradigme dans les organisations.
Ensuite, dans l’écosystème d’Amazon, il faut savoir adapter son contenu aux utilisateurs en les orientant davantage vers le produit que sur l’image. Si dans une e-boutique le consommateur a tendance à rechercher des informations sur l’univers de la marque, sur Amazon il recherche avant tout des informations sur le produit. Enfin, la livraison est également un moment capital dans la customer relation car c’est le premier lien physique avec le client. Il faut entretenir le cérémonial de l’unboxing, soigner le packaging, donner de l’ampleur au produit à travers la taille du paquet. Après l’acte d’achat, la gestion des avis et retour clients, tant sur le produit que la livraison, est essentielle.
FFF – Quelle est la part de liberté laissée aux marques de parfum pour se différencier qualitativement et mettre en avant leurs produits ?
Lawrence Taylor : Il existe 3 types d’environnement différents à intégrer dans une stratégie. Tout d’abord, la fiche produit. Il faut connaître et respecter la grammaire d’Amazon (titre, descriptif et image, qui doit être qualitative et impérativement sur fond blanc). Respecter ces règles permet de remonter de façon optimale. En bas de la fiche, les contenus A+ sont une opportunité pour enrichir les contenus en décrivant l’univers du parfumeur, les déclinaisons du parfum (flankers) ainsi que les engagements RSE. Enfin, les stores, qui fonctionnent comme des corners en magasins, permettent de déployer l’univers d’une marque et son offre.
Propos recueillis par Axelle de Larminat